Quelle transition écologique promouvoir ?
par Corentin ChaparteguiLa transition écologique, d’abord une transition sociale
Il est indiscutable que l’humanité consomme trop de ressources et souille sa propre planète à des niveaux dépassant toute capacité de régénération naturelle ; cependant il faut se poser la question de quelle humanité nous parlons.
Qui consomme à en détruire les espèces vivantes, à en stériliser les environnements terrestres et marins, à en saccager jusqu’aux territoires où l’existence humaine y est possible et aisée ? Ce ne sont pas les familles miséreuses du tiers-monde, ni les familles pauvres des pays en développement et pas plus les familles précaires de France.
Au contraire, entre 1990 et 2015 en Europe, la moitié des habitants les plus pauvres ont réduit d’un quart leur émission de CO2. Là où la pollution augmente, c’est chez les couches détentrices du plus fort capital financier de la population, dans le dixième où se concentre les capitalistes, qui cumulent 50% des émissions au niveau mondial, 27% au niveau européen.
Au niveau mondial, sur la période 1990-2015 d’après un chiffrage d’Oxfam International, si les 10 % les plus riches avaient consommé comme les 90 % les plus pauvres, 47 % des émissions de CO2 n’auraient jamais été émises, soit 353 milliards de tonnes.
Ce n’est donc pas l’humanité qui consomme trop, mais la part dominante de celle-ci, qui tout en maintenant le reste de la population dans un niveau de vie dégradant (rappelons qu’un ouvrier, rien qu’en France vit 6,4 ans de moins qu’un cadre selon l’Insee), la condamne sur le plan environnemental par ses consommations excessives.
Les écologistes qui refusent d’observer la réalité sociale et s’astreignent à croire que n’importe qui peut réduire sa consommation énergétique s’il en a l’envie et quelques piécettes de l’État, n’ont cessé de borner le problème de l’environnement à la question technique (tout en élevant, au passage, en argumentaire la culpabilisation des plus démunis et de leur train de vie qui, bien que comportant un chauffage gonflé par les passoires énergétiques et des voyages en voitures peu économes en carburant, se trouve être bien moins environnementalement dispendieux que celui des riches, comme il a déjà été dit).
Ainsi le problème de dégradation de nos territoires serait le fait d’une industrie non encore assez développée, non assez énergétiquement rentable. Si bien sûr, la technologie pourra chaque jour s’améliorer et renforcer notre lutte, tout mène à penser qu’il ne faut pas attendre les voitures volantes pour penser à réduire nos émissions de produits polluants.
Le MJCF, héritier de la théorie marxiste et de son matérialisme, doit s’opposer vigoureusement à cet écologie étroite. La question de l’environnement est une question sociale avant tout. Pour reprendre les mots d’Engels : « la répartition est dans chaque cas le résultat nécessaire des rapports de production et d’échange d’une société déterminée ».
En somme, les problèmes de consommation sont liés aux problèmes de production et d’accès aux fruits de la production ; voilà le mot d’ordre que doivent rappeler les jeunes communistes à celles et ceux qui tentent de détourner le problème et de remettre la résolution du problème entre les mains de la technologie.
Partant de cette analyse, les clefs de la résolution du problème écologique résident dans deux principes. Le premier, c’est la garantie de l’offre tant dans la quantité que dans la qualité, par une formation largement accessible et qualitative, par un salaire juste, etc. Le second, c’est la garantie que la demande concerne toute la France et ne soit pas l’apanage d’une minorité fortunée.
Si notre programme est la transition énergétique par une évolution socialiste des rapports de production, les deux points susdits sont les conditions d’une stratégie que notre mouvement doit revendiquer. Cette stratégie porte en elles, des revendications aussi étendues que les nationalisations des secteurs stratégiques pour garantir une rémunération juste et un statut stable par la fonction publique aux artisans de la transition énergétique nationale ; que la réhabilitation énergétique des logements, suppléée de la réquisition-réhabilitation énergétique des logements vacants pour loger les plus démunis, bien souvent prisonniers de passoires énergétiques, condamnés à l’insalubrité par la précarité dans laquelle on les a plongé ; que la gratuité des transports collectifs et leur multiplication notamment dans les campagnes où l’augmentation des tarifs oblige les familles à faire des kilomètres supplémentaires chaque jour ; que l’instauration d’un mix énergétique fondé sur les énergies hydraulique et nucléaire, les plus durables et ajustables qui soient ; que le développement de l’agroécologie permettant un abandon du modèle agricole productiviste ; ou qu’encore une taxation plus importante sur les hauts revenus et sur le capital (car rappelons-le, la surconsommation touche les plus riches et c’est l’une des principales causes de l’augmentation de la pollution de notre environnement).
Tout ce qui permet une répartition équitable des productions et leur contrôle dans une portion congrue qui permette à leurs artisans de vivre dignement de leur travail s’inscrit dans la logique de cette écologie marxiste et devrait être fait écho par chaque bouche, chaque mains et chaque esprit communiste que porte en elle la jeunesse.
Aucune solution ne doit être écartée et notre Congrès doit être l’occasion de les proposer toutes, de les écouter toutes, d’en déterminer celles capables d’offrir le plus de résultats pour un moindre effort et de les porter. Pour soumettre un premier exemple, il est intéressant de se poser la question de l’offre, qui doit toujours être dans une portion congrue. Il ne faut pas manquer de main d’œuvre par exemple, mais il ne faut pas non plus produire trop jusqu’à la destruction (et c’est d’ailleurs là, un des problèmes du capitalisme).
En ce sens, nous pouvons défendre la nationalisation-fusion d’entreprises, par exemple de télécommunications pour éviter la surabondance d’implantation d’antennes relais qui ne sont, dans les zones urbaines qu’un gaspillage énergétique et un cumul inopérant d’opérateurs sur une même zone alors que tant de campagnes sont encore privées des plus simples réseaux.
Il faut enfin réaffirmer la légitimité que possède la jeunesse, et parmi elle, le MJCF à militer sur les questions environnementales.
On parle de la société d’avenir dans laquelle la jeunesse d’aujourd’hui s’épanouira ou subira des problèmes multipliés, et il importe donc d’y mettre les deux mains à la boue. Cette question est, pour notre mouvement, d’une importance notoire puisqu’il y a un changement de paradigme du technique au social qu’il faut impulser et sur lequel nous aurons à faire entendre une voix qui n’est pas celle de ceux qui s’arrogent l’écologie pour la mettre en réalité aux mains des libéraux et au service du capitalisme. Sitôt cette position actée, la jeunesse communiste n’aura qu’une seule mission ; mener la bataille de l’écologie marxiste.
Car les Verts, sous couvert d’être une alternative sachant parler aux jeunes, n’ont fait qu’étendre le front libéral aux questions d’environnement ; il importe désormais de savoir y répondre et d’y mener bataille, d’interpeller les élus et de faire valoir que le premier geste de sauvegarde de notre planète n’est pas prendre le vélo mais taxer le capital.
En conséquent, lors de son 43ème Congrès, le MJCF doit affirmer que la question écologique se pose désormais au niveau social, les techniques étant suffisamment avancées pour appliquer la transition écologique. C’est le déploiement de ces techniques et technologies en France, ainsi que l’enrayage des pratiques de surconsommation caractéristiques des couches les plus hautes de la société qui composeront la véritable transition écologique.
Il importe durant ce Congrès d’approuver l’analyse sur la cause sociale du problème écologique et de la défendre, mais aussi de penser aux réponses que cette analyse permet de faire découler de la situation actuelle. Ces réponses seront nos revendications et par conséquent, l’arme chargée d’avenir de nos campagnes nationales.
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