Quelles revendications du MJCF pour sortir de la précarité étudiante ?
par Pasa AKINRevenu étudiant, Allocation d’autonomie, Allocation sociale des travailleurs en formation
Préambule : Cette contribution n’a pas vocation à apporter une solution mais à ouvrir un champ de réflexion sur un système plus équitable. Elle permet d’articuler les principes moraux que nous défendons, par la démarche philosophique, avec notre rigueur scientifique économique et marxiste.
Depuis plusieurs années les organisations syndicales étudiantes et de jeunesses politiques s’efforcent de faire entendre la précarité étudiante. La principale cause de l’échec scolaire dans l’enseignement reste le salariat étudiant. Près d’un étudiant sur deux est obligé de se salarier en parallèle de son cursus. Pour l’immense majorité des cas, cela se fait par contrainte et au détriment de leurs études.
Le système de bourse que nous connaissons pour pallier les inégalités sociales est à bout de souffle. Quelques revalorisations successives n’ont pas suffi à compenser la précarité ni même l’inflation. Cela pour 3 raisons. Dans un premier temps, l’indice de l’inflation depuis 2016 est de 4,8% alors que la revalorisation des bourses sur critères sociaux depuis la même année n’a été que de 4.3%. Deuxièmement parce que l’inflation étant calculée sur un panier de consommation d’un ménage moyen. L’étudiant disposant d’une structure de dépense bien différente et ne peut être comparé à un ménage moyen. Troisièmement, le dernier rapport de l’UNEF montre que l’augmentation du coût de la vie étudiante n’est pas identique sur tout le territoire français (+5,79 à Lyon et 1,82% à Evry). De plus, le pouvoir d’achat que confère un échelon de bourse n’est pas équitable par rapport au coût des différentes villes universitaires.
Enfin le droit civil ne garantit en aucun cas l’égalité et la couverture de l’étudiant face à la précarité.
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« Chacun des parents contribue à l’entretien et à l’éducation des enfants à proportion de ses ressources, de celles de l’autre parent, ainsi que des besoins de l’enfant. Cette obligation ne cesse pas de plein droit lorsque l’enfant est majeur. »
article 371-2 du Code civil
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Pourtant c’est bien sur le revenu fiscal des parents que se base notre système de bourse actuel.
Toutes ces raisons nous poussent alors à trouver un nouveau système de bourse. En prenant en compte des variables spatiotemporelles : Indice des loyers, Indice des prix à la consommation de l’assurance, de la téléphonie, des masques, des frais bancaires etc. Autant de variables nécessaires pour déterminer la situation réelle de chaque étudiant. La mise en place de cette mesure doit nécessairement donner une place à l’étudiant dans le processus de production : cela passe par un statut social étudiant conférant une protection sociale.
L’émancipation de l’étudiant, face au travail salarié, doit passer par une autonomie financière totale.
Cette nouvelle allocation aura un coût. Il est dès lors important que chaque étudiant puisse connaitre la politique familiale française autour de la question fiscale. Ainsi notre organisation doit plaider pour la redirection de l’ensemble des avantages fiscaux (réductions d’impôt et crédits d’impôt) qui sont aux bénéfices de nos parents vers notre système de bourse. Puisque c’est à l’Etat de prendre en charge l’ensemble des coûts, nous ne pouvons y laisser les avantages aux parents.
Notre réforme doit passer par :
1. La suppression de la réduction d’impôt pour frais de scolarité. (article 199 quater F du CGI)
Cette mesure octroie une réduction d’impôt de 183€ par enfant dans l’enseignement supérieur. Cette réduction d’impôt étant largement méconnue le fisc ne dénombre que 1 119 489 d’étudiants en 2018 alors qu’ils étaient plus de 2,4 millions d’étudiants nationaux inscrits dans l’enseignement supérieur. Au moins la moitié des parents ayant des enfants dans l’ESR n’ont pas sollicité cette aide.
Le fléchage de cette mesure permettrait d’augmenter le budget des bourses de 439 millions d’€
2. La suppression de la demi-part fiscale étudiante. (article 6 du CGI)
La seconde mesure, et de loin la plus importante, permet un partage du revenu familial. Le manque de données ne nous permet pas de donner un chiffre précis sur le montant de ce nouveau fléchage mais on peut prétendre facilement doubler le budget des bourses actuels.
3. La suppression de la déduction d’impôt sur la pension alimentaire versée aux étudiants. (article 156 II. 2° du CGI)
Conséquence directe de la mesure précédente puisqu’elles vont de pair. En effet les deux mesures fond l’objet d’un arbitrage entre « rattachement au foyer fiscal » ou « pension alimentaire » au profit du dégrèvement le plus important. Aussi il n’est pas possible de connaitre la somme des pensions attribuées aux étudiants par leurs parents puisque la feuille d’impôt ne précise pas la situation exacte du bénéficiaire. Aux yeux des impôts, tous entrent dans la même case qu’ils soient étudiants, jeunes, sans emplois, etc.
L’ensemble de ces mesures doivent nous permettre de prendre conscience qu’il existe aujourd’hui des leviers permettant de financer notre réforme sociale. En soulignant notre critique du droit civil et du code général des impôts. Dès lors notre organisation se dote d’une démarche rigoureuse dans la riposte des arguments en faveur d’une politique de réforme des bourses promise tous les ans par le ministère de l’enseignement supérieur mais qui n’a jamais abouti.
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